
Ma grand-mère me dit qu’elle l’a vue naitre Monique, ou presque. Elle la connait depuis ses trois ans. Elle n’était pas proche non, mais ses parents habitaient le même petit village, alors on se connait forcément.
Aujourd’hui, Monique est employée à la mairie d’une petite ville de province, adjointe au maire. Dimanche midi à la maison de retraite, on la croirait en campagne pour l’investiture à la primaire américaine. Elle passe de table en table dans la grande salle du réfectoire. Monique garde son manteau même s’il fait très chaud, comme pour se donner une carrure. La certitude qu’elle ne fait que passer. Monique a environ soixante-cinq ans, elle est maquillée, apprêtée et on devine qu’elle se sent importante ici. Elle distille des compliments surannés et des questions qu’elle laisse parfois en suspens. On perçoit chez elle une moitié de bonne volonté, mais une moitié quand même, et c’est déjà beaucoup au regard du vide qui nous entoure.