Thierry est aviculteur. Il a hérité de l’exploitation familiale avec son frère : l’usine et ses quatre bâtiments où ils produisent des poussins à la chaîne. Rien à voir avec les mastodontes des grands groupes français, mais tout de même, ils vendent chaque semaine des dizaines de milliers d’oisillons, pour quelques centimes d’euros. Cela représente toute sa vie, Thierry n’a connu que ça. Les étés et les week-ends à y travailler quand il était au lycée, faire embaucher ses copains pour se marrer, travailler dur toute la semaine et puis se défoncer un peu les week-ends.

Il a rencontré sa femme il y a neuf ans, ils ont eu deux garçons ensemble. Il y en aura bien un pour reprendre l’exploitation. Thierry travaille tout le temps, sans cesse, c’est la malédiction de son métier, les poussins ne cessent jamais d’avoir besoin de soins. Avec Marianne ils partent deux semaines par an. Elle le tanne pour partir plus souvent, voir leurs amis au Luxembourg et en Picardie. A chaque fois, Thierry dit « on verra ». Mais à chaque fois qu’il s’absente quelques jours, il se passe quelque chose, alors il préfère rester.

Thierry leur a fait construire une grande maison à quelques minutes de l’usine. Il y a une belle terrasse pour laisser les enfants jouer et un immense salon ou repose l’antique table en noyer. Thierry est éreinté par ses journées. Le midi il rentre déjeuner chez lui, et le soir il aime regarder des séries sur Netflix. Marianne a arrêté de travailler pour s’occuper des enfants. Une ou deux fois par mois, il retrouve les copains et alors il ne répond plus de rien. Thierry n’était pas là pour la naissance de son dernier, il était rond comme une pelle.