
Anaïs navigue entre les tables, monochrome noir et blanc, la chemise rentrée dans son pantalon qui souligne une taille de jeune fille. Elle sert dans un salon de thé pas comme les autres, un lieu on l’on se dessert la mâchoire, on l’on attendrit ses papilles au juste prix à grands coups de glace caramel beurre salé et de mille-feuilles vanille. La vraie vanille – tendre, suave, sucrée – à l’exotisme non éphémère mais qualitatif, pas amoindrie à grandes lampées de sucre raffiné et bon marché.
Anaïs apporte le tout avec dextérité, le sourire en plus et le service attentionné. Dans ce temple du luxe honnête et pourtant extraordinaire, je lui ai demandé une direction. Elle m’a expliqué en quelques mots comment me rendre sur les lieux, ajoutant que la voiture ne serait pas nécessaire. J’ai alors répondu qu’il n’y avait pas de risque, notre voiture étant garée sur le parking d’un château à quelques kilomètres de là ; château où nous n’avions clairement pas les moyens de séjourner. Cela a sonné tellement snob pourtant, « genre nous on est là-bas tu comprends ma brave petite ». Alors que l’essentiel était ailleurs, je voulais dire que nous avions fait plusieurs kilomètres à pieds pour arriver jusqu’ici, alors cent mètres de plus ne nous effrayaient pas.
Mes amis ont bien rigolé, et cela m’a donné matière à réflexion sur mes jugements hâtifs et mes propres maladresses : tâcher de ne pas juger les gens seulement sur quelques instants.