Ma mémère, je t’aime.
Tu t’es éteinte hier soir le cœur plein – je l’espère – de cette vie si riche que tu as mené. Ta mémoire d’éléphant peuplée de tous ceux que tu as aimé, de ceux qui t’ont aimée en retour, de tes joies et de tes peines.
Tu es partie après nous avoir fait un formidable cadeau, puisant dans tes forces déclinantes pour passer tes derniers jours de vie entourée de ta famille, de tes filles, de tes petits-enfants et arrière-petits-enfants. Tu es venue célébrer la vie et la joie une dernière fois pour le mariage de ton petit-fils.
C’était un acte d’amour et de bravoure que chacun de nous chérira.
C’était un acte de résistance contre le temps qui avance.
Je garde gravé dans ma mémoire cette image de toi samedi dernier, assise en terrasse au bord de cette plage magnifique où nous remettions ça une nouvelle fois après les festivités de vendredi. Tu étais là toi aussi, usée mais infatigable. Tu nous faisais grâce de ta présence aimante une dernière fois. Je t’ai dit que je te prenais en photo et tu m’as regardée, la tête haute et le regard fier. Tu étais belle et sereine.
Tu nous as donné une leçon de vie, faisant tes adieux avec dignité et humilité. Tu as tenu ton arrière-petit-fils et sa vie toute neuve dans tes bras où la vie déclinait et il t’a souri.
Ta vie était accomplie. C’était ton dernier voyage.
Mémère, tu es l’héroïne d’un roman qui ne s’éteindra pas. Ou d’une bande dessinée plutôt. Une silhouette intrépide et fantasque – vivante – quelque chose de drôle, léger et aventurier. Un peu grivois aussi parfois, comme toi. Tes cheveux fins et délicats s’envoleraient dans le vent et tu conduirais un vélo ou une moto pétaradante selon les jours. Tu aurais ton caractère bien trempé et tu parcourrais le monde, quand tu ne serais pas attablée dans ta cuisine en train de faire faire une dictée à l’un de tes petits-enfants, exigeant toujours le meilleur de chacun.
De toi je garderais la liberté et la malice avec lesquels tu as mené ta vie. Une vie laborieuse mais heureuse que tu t’es choisie avec passion. J’emporte avec moi ton rire en cascade, ton amour des voyages, ta curiosité et ta détermination jusqu’au bout. J’imagine la jeune femme amoureuse que tu as été, la mère aimante et occupée, la danseuse infatigable.
Demain, nous poursuivrons nos vies sans toi, riches de tout ce que tu as semé. Nous conterons notre mémère à nos compagnons et nos compagnes, à nos enfants et petits-enfants. Nous cultiverons tes fleurs et nous parcourrons tes chemins de campagne. Les jeunes mariés te murmureront des mots doux en sillonnant la Chine que tu as tant aimée, le seul pays où tu regrettais de ne pas pouvoir retourner.
Et je viendrai te voir, te raconter la vie et ses mouvements dans ce petit cimetière.
Très beau texte.
Je ne savais pas. Je suis sincèrement désolée pour toi et ta famille et te souhaite du courage dans cette nouvelle vie sans elle.
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En pensée avec toi.
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