Marie, Fred, Emma et Luc sont assis en rang d’oignons dans l’orchestre du Théâtre de l’Atelier. Le visage de Luc est barré d’une mèche de cheveux noirs qui balayent ses yeux sombres et son teint hâlé. Fred porte ses cheveux courts et grisonnants, en brosse, le teint artificiellement orangé. Il se tient bien droit à côté d’Emma.
Il m’a suffit de les apercevoir au moment où l’ouvreur nous désignait nos places en marche forcée pour comprendre que ces deux là voulaient se faire remarquer. Fred et Emma parlent forts et rient grassement du besoin de sentir l’attention alentour fixée sur eux. Marie et Luc se maintiennent profondément enfoncés dans leur siège à chaque bout de la rangée, silencieux. Ils ont tous la quarantaine, et je crois comprendre qu’ils veulent nous faire comprendre qu’ils connaissent une des actrices, Adèle Haenel.
Quand la pièce commence, il y a ce bip lancinant qu’ils commentent à haute voix, parce que « vraiment, c’est trop chiant ». Puis ils s’ébattent quand Adèle s’affirme sur scène et à la fin, l’applaudissent avec vigueur, trépignant à l’idée qu’elle leur adresse un signe distinctif qui les placeraient irrémédiablement au-dessus de la mêlée clairsemée et peu unanime. Adèle finit par leur adresser un clin d’œil entendu et amusé.
Il n’y a pas que sur scène que l’homme se donne en spectacle…
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